Jean Geringer est enseignant-chercheur en ingénierie biomédicale à l’École des Mines de Saint-Étienne depuis 2006. Le 12 mai dernier, lors du salon Orthomanufacture dont il est co-organisateur avec des partenaires industriels. MEP a eu le plaisir de l’interroger sur son parcours, ses recherches et sa vision des futurs ingénieurs de notre école.
Bonjour Monsieur Geringer, merci d’avoir accepté de nous recevoir. Pour commencer, pourriez-vous nous décrire rapidement votre parcours ?
Après deux ans de classes préparatoires aux grandes écoles, j’ai intégré l’École Nationale Supérieure de Chimie de Toulouse, maintenant dénommée ENSIACET. J’ai par la suite passé les concours pour pouvoir enseigner la physique-chimie : d’abord le CAPES puis l’agrégation de sciences physiques option chimie.
Un master en sciences des matériaux dans les laboratoires de biomatériaux de l’École des Mines de Saint-Etienne, m’a ensuite permis de faire mes premiers pas dans la recherche. J’ai poursuivi avec une thèse dans le domaine de la tribocorrosion (l’étude des frottements des biomatériaux pour les prothèses de hanche en milieu corrosif), réalisée en partie aux États-Unis à l’Université de Penn State- Pennsylvanie et en partie à l’INSA Lyon. En 2006, j’ai pris le poste d’enseignant-chercheur à l’École des Mines de Saint-Etienne et travaille depuis au Centre Ingénierie et Santé de l’école.
Pourquoi vous êtes-vous orienté vers les sciences des matériaux ?
C’est en classes préparatoires que j’ai pris goût pour la chimie. À l’époque, un professeur (M. E. Fabritius) m’a marqué et donné envie de poursuivre en école d’ingénieurs orientée en chimie. C’est lors de ma thèse en sciences de matériaux que j’ai découvert l’expertise de l’école dans ce domaine.
Sur quels projets travaillez-vous actuellement à l’École des Mines de Saint-Etienne ?
Je travaille précisément sur les matériaux biocompatibles et leurs propriétés : des polymères, en passant par les métaux et les céramiques.
En ce moment, nous travaillons à l’école sur l’étude du bruxisme, communément appelé le grincement des dents. Il s’agit d’un trouble dentaire qui correspond à un mouvement inconscient diurne ou nocturne des maxillaires en dehors des phases de mastication et de déglutition. Ce projet a été suivi avec un étudiant de l’école dans le cadre du projet recherche de troisième année. Une solution proposée est de réaliser une gouttière sur-mesure, semblable à celle que portent les rugbymans, que le patient porterait la nuit. Notre travail est alors de déterminer les matériaux optimaux pour la fabriquer. Le défi est de trouver des mélanges de polymères qui améliorent leur résistance aux frottements dans les zones où les contraintes sont les plus fortes tout en ayant l’épaisseur la plus faible possible. Nous sommes également en collaboration avec des industriels pour produire ces dispositifs médicaux sur-mesure. Dans le cadre d’un autre projet par exemple, j’étudie la mousse de titane qui est utilisée dans les avions mais aussi dans le domaine biomédical !
Nous nous trouvons actuellement au Salon Orthomanufacture. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Ce salon existe depuis 2001, le CEM, Cercle d’Études des Métaux, de l’École est un des fondateurs. Depuis 2017, il existe dans sa forme actuelle, il se déroule chaque année, en alternant une fois en France à Saint-Étienne et l’autre en Suisse (Yverdon, par exemple), qui est notre partenaire depuis plusieurs années. Cet événement accueille plusieurs industriels et exposants dans le domaine de l’ingénierie orthopédique (les implants) mais également des chirurgiens et médecins de l’Europe entière. Sur les deux jours, de nombreuses conférences sont organisées.
Pourquoi avez-vous choisi d’enseigner ? Qu’est-ce que cela vous apporte ?
J’encadre actuellement, dans le cadre du tronc commun de première année, des travaux dirigés en thermodynamique et mécanique des fluides. Je dispense aussi des cours en ingénierie biomédicale, biomatériaux et biopolymères dans la majeure Ingénierie Biomédicale et dans le défi Santé et Médecine Personnalisées pour les élèves de deuxième et troisième années.
J’ai l’occasion d’étudier des applications de la mécanique des fluides et de la thermodynamique au domaine biomédical. On peut citer par exemple l’écoulement du sang dans les vaisseaux, entre deux matériaux ou bien l’utilisation de machines thermiques et l’application récente de circuits électroniques dans le corps avec les problématiques de transfert d’énergie par transfert thermique.
Ce qui me plait dans l’enseignement c’est de, bien-sûr, accompagner les élèves, leur apprendre et leur faire comprendre des choses mais aussi, d’un point de vue plus personnel, de ne pas ‘rouiller’ cela me permet de me prouver à moi-même que je suis encore capable de transmettre des connaissances sur des sujets divers.
Pourquoi avoir choisi le monde de la recherche académique plutôt que celui de la R&D en entreprise ? Et pourquoi avoir choisi de rester en France et de ne pas partir à l’étranger ?
Le monde de la recherche académique nous permet de suivre nos idées et nos propres projets plus facilement. Ce n’est pas le marché ou les demandes des clients qui guident nos recherches. Alors que travailler en industrie ou dans un service de R&D en entreprise nous donne moins de liberté, on nous demande moins notre avis.
Je ne suis pas resté aux États-Unis pour des raisons personnelles mais j’ai beaucoup apprécié découvrir une autre manière de penser et de travailler dans un laboratoire de recherche. Le quotidien au travail est forcément différent dans un pays étranger et c’est très enrichissant d’avoir l’occasion de découvrir ça au cours de nos carrières d’enseignants-chercheurs. Je travaille toujours avec des collègues américains et pour certains, ce sont devenus des amis très proches.
Comment caractérisez-vous le profil des étudiants que vous formez ?
Les élèves des Mines de Saint-Etienne ont, si je peux dire, un cerveau bien fait. Ils savent réfléchir sur des problèmes variés et ont un aperçu assez global des domaines de l’ingénierie. L’école permet aussi aux élèves de maintenir le « cap des sciences » en proposant des enseignements scientifiques de bons niveaux.
Plus généralement, quels sont les avantages de l’Ecole des Mines de Saint-Etienne, et en particulier dans votre domaine de recherche ?
L’avantage de l’École des Mines de Saint-Etienne est qu’elle se situe dans un creuset entre personnels hospitaliers, enseignants-chercheurs, industriels et ingénieurs. Ceci est plutôt rare en France et très enrichissant pour chaque acteur ! Nous avons la chance d’avoir le Centre Ingénierie Santé de l’école sur le campus de la faculté Jean Monnet de médecine, à côté de l’Hôpital Nord de Saint-Étienne.
Nous remercions chaleureusement M. Geringer pour le temps qu’il nous a accordé. Mines Études et Projets (MEP) propose à ses clients les compétences en informatique, gestion-stratégie, et ingéniérie des étudiants de l’École des Mines de Saint-Étienne. MEP est la Junior-Entreprise de la filière généraliste de l’École des Mines de Saint-Étienne. N’hésitez pas à nous demander un devis pour réaliser vos projets.